Le transport aérien a connu l’an dernier une crise sans précédent dans le monde entier et tout particulièrement en Europe où la baisse de trafic a atteint 70,4 % – et même 73 % au sein de l’Union européenne : 728 millions de passagers contre 2,4 milliards en 2019. Grâce à l’importance de son trafic domestique, la France a fait un peu mieux (ou moins pire) que la moyenne mais le nombre de passagers a tout de même chuté de 67,3 % : tout juste 70 millions de passagers contre plus de 214 millions l’année précédente. Et ce début d’année est encore difficile : le mois dernier, l’aéroport de Nice (2ème plateforme française après Paris) était encore en recul de 78,7% par rapport à février 2020 (juste avant le premier confinement).
La demande est déjà là !
Mais l’heure est à la reconquête, affirme Thomas Juin, le président de l’Union des aéroports français. Cette reconquête prendra au moins deux ans, mais il le constate : la demande est là, les Français ont envie de voyager de nouveau. Alors il faut que l’offre soit au rendez-vous, que les compagnies aériennes étoffent leurs programmes, notamment les low-cost qui ont tiré la croissance de ces dernières décennies en multipliant les ouvertures de lignes et en démocratisant le voyage en avion. Et c’est là que les difficultés se présentent. Il y a bien sûr les restrictions liées à la pandémie de Covid-19 : les campagnes de vaccination et le passeport sanitaire numérique préparé par l’Union européenne devraient faciliter les choses. Mais, en France, il y a aussi la fameuse loi Climat et Résilience : un handicap franco-français dans la concurrence avec les autres pays européens pour attirer les compagnies aériennes. Fortement fragilisées par la crise, elles vont se redéployer sur les lignes les plus rentables. Rentables en termes de recettes (le potentiel de trafic) mais aussi en termes de coûts. « Nous sommes compétitifs pour les redevances demandées par les aéroports » calcule Thomas Juin, « mais en matière de taxes, il faut être beaucoup plus incitatif, à l’image par exemple des baisses fiscales que vient de décider le Royaume-Uni ». Actuellement, chaque passager paie jusqu’à 22 € de taxes au départ d’un aéroport français pour un vol court-courrier en éco, contre 14 ou 15 € en Allemagne et au Royaume-Uni, 7 € en Italie, 3 ou 4 € en Espagne et au Portugal ! Et ne parlons pas de ces pays totalement exotiques où il y a même zéro taxe : Belgique, Danemark, Pays-Bas… Quant à la loi Climat, elle revient pour Thomas Juin « à se tirer une balle dans le pied et à sacrifier l’avenir des territoires » avec certaines de ses dispositions, notamment l’interdiction de lignes intérieures et la limitation d’extensions d’aéroport.
Bâtir une stratégie gagnant-gagnant
« Il faut dire la vérité aux Français » demande le président de l’UAF. Dire que l’impact du transport aérien sur le changement climatique est infime : tout au plus 2 à 3 % des émissions de CO2. Répéter que l’aérien est indispensable à la connectivité, à l’attractivité et au développement des territoires. Et souligner que les déplacements rapides entre régions ne peuvent se faire qu’en avion : là où le train pouvait remplacer l’avion, il l’a déjà fait ! « La philosophie-même de cette loi est inadaptée et inopérante ». D’une part, on ignore la décentralisation aéroportuaire ; d’autre part, on est dans une logique de décroissance, de destruction d’emplois et de richesse ; enfin, on ne veut pas voir tous les progrès déjà accomplis avec les avions les plus récents et tous les programmes aéronautiques en cours pour décarboner l’aérien. Sans oublier la compensation carbone développée par les compagnies aériennes et l’engagement des aéroports dans le programme Airport Carbon Accreditation : 4 aéroports français sont déjà au niveau de la neutralité carbone : Lyon Saint-Exupéry et le groupe azuréen Nice – Saint-Tropez – Cannes-Mandelieu. Pour Thomas Juin, il est bel et bien possible (et indispensable) de « bâtir une stratégie gagnant-gagnant pour l’emploi et les territoires comme pour la planète ».
Le classement 2020 des aéroports du Grand Sud
Voici le classement des principaux aéroports de notre Grand Sud avec le nombre de passagers enregistrés l’an dernier et l’évolution par rapport à 2019 :
- Nice Côte d’Azur : 4 580 459 passagers (- 68,4 %)
- Marseille Provence : 3 359 149 passagers (- 66,9 %)
- Toulouse-Blagnac : 3 130 847 passagers (- 67,5 %)
- Bordeaux-Mérignac : 2 264 368 passagers (- 70,6 %)
- Montpellier Méditerranée : 805 907 passagers (- 58,4 %)
- Biarritz Pays Basque : 383 366 passagers (- 64,0 %)
- Toulon Hyères : 206 064 passagers (- 59,4 %)
- Perpignan-Rivesaltes Méditerranée : 189 303 passagers (- 57,7 %)
- Pau Pyrénées : 184 926 passagers (- 69,5 %)
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