Journaliste, écrivain, homme de cinéma et de télévision, Serge Moati est aussi le président du Festival des créations télévisuelles qui se tient chaque année à Luchon, dans les Pyrénées haut-garonnaises. Il nous en présente l’édition 2018, qui se tient du 7 au 11 février avec un jury présidé par Julie Depardieu. Il nous parle aussi de sa destination préférée : la Tunisie où il est né en 1946 et où il a vécu jusqu’à l’âge de 11 ans.
Le Festival des créations télévisuelles a vingt ans cette année. C’est le plus bel âge pour une telle manifestation ?
On n’a pas tous les jours 20 ans ! Moi, j’en ai 71 et ça m’agace. Alors avoir 20 ans, c’est formidable et ça se fête. C’est la fête de la télévision au cœur des Pyrénées. Une télévision qui atteint des sommets avec les fictions, séries et documentaires que nous sélectionnons avec ferveur et enthousiasme, et avec une liberté et une indépendance totales.
Quels seront les traits marquants de cette édition 2018 ? La présence des web-séries ?
Nous célébrons la création télévisuelle sous toutes ses formes, du moment qu’elle est de qualité. Le web peut apporter quelque chose de différent. Nous accueillons donc des webséries pour la deuxième édition consécutive, et des documentaires pour la troisième année.
Avez-vous maintenant pris vos marques dans cette cité pyrénéenne, vous qui êtes d’abord un homme de la Méditerranée ?
J’adore les gens de Luchon ! Je dois avouer que quand on m’a proposé la présidence du festival, il y a dix ans, je ne savais même pas où se trouvait Luchon. La honte ! Mais j’ai été immédiatement et complètement séduit par la générosité et la chaleur des gens. Le festival, c’est 30 000 entrées et c’est 360 bénévoles qui sont là pour accueillir et accompagner les quelque 1 100 professionnels qui font le déplacement et qui sont tous incroyablement conquis. J’en vois certains repartir avec la larme à l’œil – et ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas reçu de prix !
Et votre Tunisie natale ? Vous continuez d’y retourner régulièrement ?
J’y vais au moins deux ou trois fois par an. La demeure familiale n’existe plus mais je loue une maison à l’année, à La Marsa, où je revois des copains d’enfance. C’est un peu mon « paradis perdu ». Vous savez, j’ai quitté la Tunisie à l’âge de onze ans et dans des conditions difficiles, juste après la mort de mes parents. J’ai mis dix ans pour y retourner, et encore, ce fut dans un cadre professionnel, avec une caméra pour me protéger en quelque sorte. Mais depuis j’y retourne avec un réel bonheur et je ne m’en lasse pas. J’ai été de tout cœur avec la révolution tunisienne, née d’une révolte sociale puis contre Ben Ali. Aujourd’hui, la situation économique est assez catastrophique, la vie est de plus en plus chère, le chômage galope, l’avenir est incertain.
Le tourisme était une composante majeure de l’économie tunisienne. Il retrouve un certain essor…
Oui et je suis heureux de voir les touristes français reprendre le chemin de la Tunisie, surtout qu’une nouvelle forme de tourisme se développe avec les maisons d’hôtes où on est reçu comme dans la famille. Les Tunisiens sont des gens adorables, il faut aller à leur rencontre et ne pas s’enfermer dans les hôtels-clubs des années soixante-dix. Et puis il y a tant de choses à voir. Tunis est une ville magnifique avec ses immeubles Art déco ou rococo, la médina est superbe, les souks sont admirables et il faut monter aux jardins du Belvédère pour contempler la ville et sa baie. Il y a Sousse aussi, et puis Bizerte, le pays natal de mon papa, avec sa vieille ville coloniale, et puis Tozeur, etc.
« À chaque retour à La Marsa, c’est le vertige des retrouvailles. La mer, la terre, la maison. La connaissance terrienne, ancestrale, du temps qu’il va faire d’une heure à l’autre, c’est en Tunisie que je l’ai. Et pas ailleurs. Dès que je descends de l’avion, je me sens tunisien. Pas musulman, certes, mais profondément d’ici. (…) Notre identité est toujours plurielle. Moi, je suis français, tunisien, juif, arabe, cinéaste, gros, bourru, angoissé et rigolard. Je suis tout cela à la fois et bien plus encore. J’essaie d’être un homme. Et ce n’est pas facile. Mon identité, je la construis. Elle s’enrichit. Grâce aux autres qui sont une partie de moi qui ne suis qu’une infime partie des autres. »
(Serge Moati, Dernières nouvelles de Tunis)
En dehors de vos séjours en Tunisie, vous aimez découvrir de nouveaux horizons ?
J’ai eu la chance de faire pratiquement le tour du monde pour le travail – mais ce travail est un plaisir. Actuellement, je vais surtout en Israël pour un documentaire sur les 70 ans de cet état étonnant, à la fois archaïque et ultra-moderne.
Parmi les derniers livres de Serge Moati :
- « Juifs de France, pourquoi partir ? » (Stock, 2017)
- « Rêves d’Orient, mon musée idéal », avec Edward Vignot (Place des victoires, 2016)
- « Dernières nouvelles de Tunis » (Michel Lafon, 2011)
Pour découvrir Luchon et le Festival des créations télévisuelles :
www.pyrenees31.com/luchon-superbagneres
Pour préparer votre escapade en Tunisie : www.discovertunisia.com
Votre avion pour Tunis
Bordeaux – Tunis : avec Tunisair
Marseille – Tunis : avec Tunisair et Nouvelair.
Nice – Tunis : avec Tunisair et Nouvelair.
Toulouse – Tunis : avec Tunisair et Nouvelair.
Portrait Serge Moati © David Bécus
Photo Sidi BouSaïd © ONTT
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