Historien de formation, Jean-François Chougnet est l’une des personnalités marquantes de la vie culturelle française. Côté ministériel, il a notamment contribué au doublement du budget de la culture en 1981 et il a été conseiller budgétaire de Jack Lang. Sur le terrain, il a œuvré au Centre Pompidou, à la Réunion des musées nationaux, au Parc de La Villette, à l’année du Brésil en France, en 2005. Après un séjour à Lisbonne, à la tête du musée d’art contemporain Berardo, c’est à Marseille qu’il s’est imposé au début de la décennie : d’abord en tant que directeur général de l’association Marseille-Provence 2013 puis, depuis 2014, en qualité de président du MuCEM, le Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée.
Un mot, tout d’abord, de l’actualité du MuCEM en ce début d’année, à l’heure des bilans et des perspectives. Quelle a été la fréquentation du musée, à travers ses trois sites, en 2016 ?
Nous avons accueilli environ 1,4 million de visiteurs dont 590 000 pour les expositions et événements, soit une progression de pratiquement 10 %. Donc oui, on peut parler de « belle année 2016 ». Reste que l’analyse de ce genre de statistiques est toujours d’une grande complexité. La fréquentation du MuCEM repose sur trois piliers : l’architecture contemporaine du J4 conçu par Rudy Ricciotti, l’aspect patrimonial du Fort Saint-Jean et la programmation des expositions et événements. L’an dernier, plusieurs expositions ont vraiment trouvé leur public, notamment « Un génie sans piédestal » sur Picasso et les arts et traditions populaires, et « Made in Algeria, généalogie d’un territoire ». Dans un registre plus restreint, l’exposition sur « Jean Genet, échappée belle » a très bien fonctionné. Quant à notre Centre de conservation et de ressources, à La Belle de Mai, nous essayons de l’ouvrir davantage au public, notamment le week-end lors des Journées du patrimoine ou dans le cadre d’opérations conjointes avec d’autres partenaires culturels, artistiques et « mémoriels » de La Friche. Enfin, nous sommes heureux de voir que 98 % des visiteurs sont satisfaits de leur visite, dont 53 % de très satisfaits. Et quand on regarde les avis exprimés sur TripAdvisor, même s’il y a toujours deux ou trois « esprits chagrins », les opinions sont plutôt favorables. Il est vrai que nous avons largement pris en compte les critiques initiales qui portaient sur la signalétique, l’accueil ou l’attente au restaurant.
Quels seront les temps forts de 2017 ? L’exposition « Après Babel, traduire » qui est proposée jusqu’au 20 mars, « Vies d’ordures – De l’économie des déchets » de mars à mi-août, « Aventuriers des mers » dont on peut voir une première version actuellement à Paris, à l’Institut du monde arabe, et que vous accueillerez à partir du 7 juin ?
Oui et j’ajouterai l’exposition « Nous sommes foot » qui s’ouvrira le 11 octobre et qui sera moins consacrée aux gloires du ballon rond qu’à la société du football, à l’univers des supporters. Nous travaillons aussi sur 2018, année culturelle Marseille-Provence et année du 5ème anniversaire du MuCEM. Les grandes manifestations sont déjà programmées, en particulier sur le thème de l’amour à travers le roman-photo. Et pour nos 5 ans, nous avons un grand projet sur Georges Henri Rivière. C’est le père de l’ethnologie en France au milieu des années 1930 et il a vraiment marqué la muséologie contemporaine. De plus, c’était un personnage tout à fait étonnant : il a certes fondé le Musée national des arts et traditions populaires à Paris mais il était aussi jazzman et auteur de chansons pour Joséphine Baker…
City-breaks culturels ? Paris, Berlin, Lisbonne. Sans oublier Tunis
Parlons voyages maintenant. Quels sont selon vous les métropoles les plus dynamiques sur le plan muséographique en Europe ou ailleurs dans le monde, que ce soit aux États-Unis ou, par exemple, dans les pays du Golfe ?
Je dirais d’abord qu’il ne faut pas oublier Paris ! En France, on a toujours tendance à s’auto-flageller mais sur le plan artistique et culturel, Paris réunit une offre absolument exceptionnelle, autant incontournable que celle de Londres. Ensuite, je pourrais citer Berlin et Lisbonne. Berlin témoigne bien du dynamisme européen et Lisbonne vient d’ouvrir un tout nouveau musée, le MAAT, Musée de l’art, de l’architecture et de la technologie, sur les bords du Tage.
À titre personnel, quelles sont vos destinations préférées pour un city-break, le temps d’un week-end ?
Paris, bien sûr, et Lisbonne qui est vraiment mon deuxième domicile. Actuellement d’ailleurs, le MuCEM donne carte blanche à la cinémathèque du Portugal. Et puis j’ai redécouvert Tunis à l’occasion d’une expo « hors les murs » du MuCEM au musée national du Bardo, une exposition sur les « Lieux saints partagés » que nous monterons ensuite à Marrakech. Mais à propos de Tunis, je veux dire que c’est vraiment une ville passionnante, avec la médina la mieux conservée de tout le Maghreb et avec le patrimoine exceptionnel de Tunis-Carthage. Alors, oublions un peu les plages et les questions de sécurité : la Tunisie est restée un pays très accueillant et Tunis a un vrai potentiel pour les week-ends culturels.
Destination lointaine : la Corée du sud et son incroyable singularité
Et pour vos vacances, vous restez dans le monde méditerranéen ou vous découvrez chaque année des horizons plus lointains ?
Je suis généralement lisboète pendant les vacances mais il y a une destination beaucoup plus lointaine que je peux conseiller : la Corée du Sud. C’est un pays assez incroyable, certainement l’une des destinations les plus passionnantes. On connaît mal sa singularité entre Chine et Japon.
Pour terminer, notre question-bonus : quelle est la ligne aérienne qui vous semble faire défaut au départ de l’aéroport Marseille-Provence ?
On commence a être assez bien desservi au départ de Marseille-Provence ! Il y a tout de même une ligne qui serait logique et qui manque à notre territoire : une ligne directe sur New-York.
Portraits Jean-François Chougnet © Agnès Mellon
Photo MuCEM (éclairage Yann Kersale) © Mucem – Lisa Ricciotti – Architectes Rudy Ricciotti et Roland Carta
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